Le vieux concasseur de Saint-Vincent.
Si nous regardons à l’Ouest de Gaujac, là, à flanc de colline, celle de Saint-Vincent qui fut le théâtre d’une vie pleine de passé, puisqu’elle abrite toujours de nombreux vestiges archéologiques, son oppidum, deux chapelles, les restes d’emplacements de maisons, nous pouvons apercevoir un vieux concasseur qui contraste avec la richesse de ces lieux.
Et oui, il fut construit au siècle dernier dans le début des années cinquante, en effet, le quidam Gaujacois connaissait ses premières carrières.
Les rochers de Saint-Vincent furent exploités par une société la SPIR dont le siège était situé à Pont-Saint-Esprit. Elle a fait travaillé à cette époque beaucoup de gens, et pas que du village de Gaujac, tous ceux des alentours venaient y gagner leur petit pécule.
Elle employait pas loin d’une centaine de personnes, de vrais forçats, puisqu’ils ont commencé l’exploitation des rochers à grands coups de dynamite, pour ensuite transformer les blocs en petites caillasses, et à la masse !
Chacun dans son coin cognait la pierre, qui ensuite était transportée aux fours de Laudun L’Ardoise, par au moins six ou sept camions de gros tonnage, qui effectuaient sans cesse des rotations.
Les chemins n’étaient pas goudronnés, mais une équipe de cantonniers d’au moins vingt éléments en assurait l’entretien, celui-ci descendait en serpentant le long de la colline, avec des pentes comparables à celle des montagnes de l’Himalaya.
C’est là que j’ai vu rentrer en action ma première tractopelle, qui était de couleur orange, une sorte de tracteur équipé à l’avant d’un godet, et qui n’était pas très efficace, puisqu’il passait la majeure partie de son temps en panne, garé dans le lit de la Veyre au passage à gué juste à côté de la station de relevage actuelle et essuyait les coups de la Veyre jusqu’à la hauteur de ses chenilles, laissant aux cantonniers le soin de jouer de la pelle et de la brouette.
Puis, pour améliorer l’ordinaire la construction du bon vieux concasseur soulagea les forçats de la masse
et permit une plus grosse production de caillasse concassée et qui permettait aux Gaujacois de l’époque, afin d’occuper leur temps, de compter le nombre de voyages qui passait sous la creuse, pour traverser le bas du village dans un vacarme d’enfer que faisaient les Berlier ou Mack de ce temps-là…
Puis un beau soir ; s’est éteint la rengaine infernale que faisait cette vieille carcasse de concasseur, l’exploitant cessa son activité car la roche contenait trop de souffre et faisait exploser les fours de l’Ardoise!
Elle condamnait les forçats de la caillasse à un chômage forcé.
Cette manne providentielle rendait alors à la nature tous ses droits, en laissant le temps faire son œuvre, reboisant et faisant disparaître les stigmates d’une certaine époque, en permettant au village de retrouver une identité bien méritée et un calme perdu symbole de renaissance.
Christian LADET